
Monstre sacré de la culture populaire, Dark Vador pâtit parfois de préjugés alimentés par son image. Il n’a pourtant rien à envier à la complexité d’un Magnéto ou d’un Joker.
Dark Vador est un personnage complexe, ambivalent, indissociable de l’univers de Star Wars, dont il représente, mieux que quiconque, la face sombre. Présenté au départ comme un être froid et redoutable, seulement mû par des intentions malveillantes, il est ensuite portraituré de manière plus nuancée, notamment lorsqu’on apprend qu’il est le résultat d’une transformation tragique, qui lui a conféré cette apparence biomécanique. Anakin Skywalker, l’ancien Jedi, a été corrompu par le Côté Obscur de la Force, et son corps a été mutilé au cours d’un combat livré contre Obi-Wan Kenobi.
L’iconicité de Dark Vador ne fait pas un pli. Son apparence physique intimidante se caractérise par une stature imposante, une voix basse et grave, ainsi qu’une respiration artificielle pesante, qui tend à le rendre encore plus charismatique et inquiétant. Dark Vador porte une armure noire aux allures robotiques, et son corps a été modifié au cours des trois trilogies. Il a perdu jambes, bras et main. Mais il est resté cet être funeste, puissant, souvent impitoyable, discipliné et machinique, qui contraste significativement avec les nombreux personnages fantaisistes de la saga.
Créature et créateur, Dark Vador a façonné sa propre mutation. Il est devenu un monstre par choix et par ambition. En ce sens, il ne peut être comparé, par exemple, à la créature de Frankenstein, tout à fait étrangère à son état final. Anakin est passé du blanc au noir, d’un camp à l’autre, du Bien au Mal, et son apparence humaine a laissé place à un corps cybernétique reposant sur un alliage entre l’anatomique et le technologique. Il apparaît en quelque sorte dépendant de ce nouvel organisme mi-biologique mi-artificiel. C’est lui qui instaure son aura, instille la crainte et installe certains des enjeux du récit.
Cruel, tyrannique, terrifiant, Dark Vador incarne la force brute de l’Empire, et sa présence suffit à insuffler la peur auprès de ses ennemis. Il n’est pourtant qu’un monstre incomplet, au sens propre comme au figuré, car conditionné par les épreuves. Il est par ailleurs motivé par une quête de résurrection pour Padmé, son amour passionné, qu’il croit avoir été tuée par sa propre colère. Sa relation avec son fils Luke, au cœur de la saga, apporte une autre dimension au personnage : il tente de le faire basculer du Côté Obscur mais finit par se retourner contre l’Empereur pour le protéger. Sa mort prend alors l’apparence d’une rédemption, qui lui permet de retrouver une forme d’humanité.
On le voit, Dark Vador n’est pas un méchant ordinaire et figé dans un moule, mais plutôt une figure multidimensionnelle dont l’histoire est pleine de nuances. C’est la « Marche Impériale » de John Williams basculant en hymne personnel, annonçant sa présence à l’écran et sa puissance belliqueuse. Une hyper-théâtralité dans la caractérisation physique et le mouvement. Un casque qui symbolise la déshumanisation du personnage, qui dissimule son visage et, incidemment, son histoire. Une histoire pourtant riche en fêlures et en actes manqués, où des détails ont fini par enclencher une mécanique infernale, celle qui fait d’Anakin l’un des meilleurs méchants de la culture populaire.
R.P.

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