Interview, Bastian Meiresonne : « Hallyuwood s’ouvre à tout lecteur curieux d’explorer davantage le monde du cinéma coréen »

Bastian Meiresonne a publié l’ouvrage Hallyuwood aux éditions EPA. Pour RadiKult’, il revient sur le cinéma sud-coréen, son histoire, ses évolutions, ses tropes et ses têtes de proue.

Dans votre ouvrage Hallyuwood (éditions EPA), vous énoncez de manière détaillée le double mouvement, d’inspiration et de répulsion, que la culture japonaise, dans son acception la plus large, a exercé sur le cinéma coréen. Pourriez-vous nous en repréciser les points centraux ?

Oula ! C’est une question complexe, qui nécessite un ouvrage entier à elle seule ! (rires) Mais en effet, le cinéma japonais est étroitement lié à celui de la Corée, même si je risque de ne pas me faire que des amis en disant cela, surtout en Corée, où le sujet reste encore relativement tabou…

Le cinéma émerge en Corée, comme partout dans le monde, au début du XXe siècle, pendant la période d’occupation japonaise (1890-1945). Contrairement à d’autres pays asiatiques occupés, le Japon n’intervient pas vraiment directement dans la création d’une industrie cinématographique dédiée, mais plutôt encadre et contrôle son développement local. Les Japonais autorisent même l’importation et la diffusion des premiers films du monde entier, notamment des États-Unis, à partir de 1903, ce qui permet aux professionnels coréens de s’inspirer des divers courants cinématographiques internationaux. Ce n’est qu’à la fin des années 1930 que les Japonais renforcent progressivement le contrôle et la censure, en restreignant les importations de productions américaines, puis en les interdisant complètement après l’attaque de Pearl Harbor en 1941.

Ces mesures entravent considérablement le développement d’une industrie cinématographique nationale au cours des premières années. Les premières salles de cinéma sont entièrement contrôlées par les Japonais (à l’exception d’une) et leur accès est plus ou moins restreint aux spectateurs coréens et aux expatriés japonais en fonction des quartiers. Toute entreprise cinématographique devait être la propriété de Japonais, rendant ainsi difficile pour les Coréens de créer des maisons de production, qui n’ont jamais pu être indépendantes. Puis, il y avait la censure, en plusieurs étapes : l’examen du scénario, la supervision officielle pendant le tournage et la vérification avant la diffusion dans les salles. Des policiers étaient même chargés de surveiller le bon déroulement des séances, en particulier les interventions des byeonsas (bonimenteurs coréens responsables de la narration et de la sonorisation des premiers films, puis de la traduction des cartons narratifs à l’époque du muet, et des dialogues à l’époque du parlant). Pendant les dernières années de l’occupation, de 1940 à 1945, seuls les films de propagande étaient tolérés, promouvant la politique japonaise « d’un peuple uni par le sang », prônant l’assimilation des Coréens dans l’Empire japonais et encourageant la collaboration à l’effort de guerre.

L’influence japonaise est manifeste dès les premiers pas du cinéma coréen. Au début du XXe siècle, l’industrie cinématographique japonaise est l’une des plus avancées au monde, et de nombreux cinéastes coréens sont formés dans les écoles et les studios du Japon. Le tout premier film de l’histoire du cinéma coréen, Fight for Justice (Kim Do-san, 1919), est un kino-drama, un spectacle combinant théâtre et projection de scènes filmées, inspiré de son équivalent japonais, le rensageki et plus spécifiquement de l’un de ces spectacles-projections de l’époque, The Wife of the Captain. Le premier long métrage de fiction de l’histoire du cinéma coréen est The Story of Chun-hyang, réalisé en 1923 par un homme d’affaires japonais, Koshu Hayakawa. Il s’agit d’une adaptation d’un pansori, qui deviendra par la suite l’un des récits chantés les plus fréquemment transposés au cinéma coréen, avec plus d’une quinzaine de versions cinématographiques à ce jour. Le mélodrame shinpa, issu du théâtre japonais et se définissant, en gros, comme des mélodrames populaires centrés sur les malheurs de leurs personnages principaux, partagés entre un monde passé et présent, est l’un des genres emblématiques du cinéma coréen, et il perdure toujours de nos jours sous de nouvelles formes.

L’influence japonaise perdure même après la fin de l’occupation en 1945 : bien que toute importation de produits culturels nippons soit strictement interdite jusqu’en 1998, les réalisateurs de l’immédiat après-guerre continuent d’appliquer la grammaire cinématographique apprise pendant leurs années de formation les décennies précédentes. Pendant les années 1950 et 1960, des cinéastes coréens, voyageant au Japon ou participant à des festivals internationaux, s’inspirent des productions japonaises mondialement reconnues de l’époque. Les nombreux articles sur les sorties de films publiés dans des magazines de cinéma japonais importés clandestinement en Corée incitent certains cinéastes à réaliser des remakes officieux sans même avoir vu les films originaux.

En 1960, un assouplissement de la loi autorise la publication de la littérature japonaise en Corée, suscitant un engouement pour les adaptations littéraires, à la fois officielles et officieuses, et donnant naissance aux « films de jeunes ». Ce genre spécifique s’inspire du taiyozoku japonais, littéralement la tribu du soleil, qui caractérise des œuvres mettant en scène des jeunes désœuvrés dans la société contemporaine. Dans les années 1970, les films de gangsters coréens s’inspirent de leurs équivalents yakuza japonais de la même période. Parallèlement, les dessins animés japonais pour enfants diffusés à la télévision coréenne déclenchent une vague de films d’animation reproduisant les mêmes codes que leurs homologues nippons. L’abolition, en 1998, de la loi interdisant l’importation de produits culturels japonais marque le début d’une nouvelle vague d’influence majeure de la culture japonaise sur son pendant coréen. Un exemple notable à l’échelle mondiale est certainement Old Boy (Park Chan-wook, 2003), régulièrement cité comme l’un des « films coréens » les plus marquants des dernières décennies et qui est, en fait, l’adaptation d’un manga écrit par Garon Tsuchiya et dessiné par Nobuaki Minegishi et publié au Japon entre 1996 et 1998…

Au plus fort de la dictature militaire, qui a perduré jusqu’en 1987, les cinéastes sud-coréens pouvaient difficilement aller au-delà des thèmes officiellement acceptables. Comment ont-ils néanmoins contourné la censure ?

En réalité, le cinéma coréen a émergé et s’est développé sous l’ombre de diverses vagues de censure tout au long de son histoire : d’abord sous l’occupation japonaise depuis ses débuts jusqu’en 1945, puis sous la censure américaine dans les années d’après-guerre / Guerre de Corée (1950-53), suivie par celle des régimes militaires de Park Chung-hee (1961-1979) et Chun Doo-hwan (1980-1988). Même si la censure a connu un relâchement avec la démocratisation du pays et son ouverture au monde dans les années 1990, la Commission de Censure n’a été officiellement abolie qu’en 2001, remplacée par un système de « classification par tranches d’âges » similaire à celui existant en France. Néanmoins, persiste toujours, comme partout ailleurs dans le monde, la forme la plus insidieuse de censure : l’autocensure. Celle des maisons de production pour éviter de s’aliéner les politiques en place, ou pour ne pas indisposer certaines multinationales cofinançant plus ou moins directement les productions cinématographiques avec des placements de produits, etc. Bref, la forme de censure la plus universelle et contemporaine, dont on ne parle pas suffisamment, à mon goût.

Cela étant, même dans les régimes totalitaires les plus oppressifs, certaines œuvres culturelles parviennent toujours à échapper à la censure, démontrant ainsi la beauté et la puissance de l’art – c’est l’un des aspects, qui m’a toujours le plus fasciné dans mon autre travail de programmateur de films asiatiques dans des festivals… Des exemples de cette résistance se trouvent également dans le cinéma coréen, dès ses débuts avec le légendaire long- étrage Arirang (Na Un-gyu, 1926, malheureusement considéré aujourd’hui comme disparu) : ce film muet parvient miraculeusement à échapper à la censure, notamment parce qu’aucun personnage japonais n’y est dépeint en tant que méchant, et que l’agression du héros peut être expliquée par son « trouble mental ». L’histoire d’un étudiant rendu fou par les tortures infligées en prison par l’occupant japonais, et qui attaque violemment un Coréen pro-japonais tentant de violer sa sœur, devient ainsi un puissant symbole de résistance pendant l’occupation japonaise. Le film sert également de tribune politique aux byeonsas de l’époque, qui, lorsqu’ils réussissent à échapper à la vigilance des officiels présents dans la salle, s’en donnent à cœur joie pour parsemer leurs interventions de multiples allusions politiques.

Sous le régime militaire de Park Chung-hee (1961-1979), certains réalisateurs, tels que Lee Seong-gu avec La Moustache du Général (1968), ont réussi à intégrer des allusions politiques dans des adaptations littéraires. Ces films, soutenus par l’État dans le but de participer à des festivals internationaux, s’appuyaient sur des contenus littéraires, qui – eux – avaient déjà passé la censure et étaient donc moins susceptibles d’être soumis à un contrôle strict.

Il y a eu deux périodes propices à l’émergence de films plus « politiques » entre deux changements de régime, au début des années 1960 et dans les années 1980. La première a donné naissance à deux chefs-d’œuvre absolus, désormais considérés comme les meilleurs films coréens de tous les temps : La Servante (Kim Ki-young, 1960) et Une balle perdue (Yu Hyun-mok, 1960) – assurément l’un de mes films coréens préférés de tous les temps. La seconde fenêtre de tir a engendré des films socio-réalistes profondément engagés, tels que Good Windy Day (Lee Chang-ho, 1980), Les Gens d’un Bidonville (Bae Chang-ho, 1982), et La Petite Balle lancée par un Nain (Lee Won-se, 1981).

Enfin, plusieurs collectifs ont ouvertement tenté de s’opposer aux régimes en place : dès la fin des années 1920, la KAPF (Fédération Prolétarienne des Artistes Coréens) a remis en question la fonction première de l’outil cinématographique en produisant une série de films socio-réalistes dans le but d’éveiller la conscience des classes. Dans les années 1970, le collectif cinématographique Yeongsang sidae (littéralement : L’Ère de l’Image) a tenté de « renverser les murs de l’autoritarisme » avec une petite série de films assez provocateurs destinés à des spectateurs plus jeunes. Enfin, dans les années 1980, plusieurs associations étudiantes ont réalisé les tout premiers longs métrages de fiction fondamentalement indépendants en marge de l’industrie cinématographique, tels que O Dreamland (Lee Eun, Jang Dong-hong, Chang Yoon-hyun, 1988) et The Night before the Strike (Lee Eun, Lee Jae-gu, Chang Yoon-hyun, Jang Dong-hong, 1990).

Avant l’ère démocratique, véritablement initiée en 1993, à quoi ressemblait l’industrie cinématographique coréenne ?

Malheureusement, je n’étais pas personnellement présent ou en vie pour témoigner de ces époques fascinantes, mais mes recherches approfondies et mes découvertes ont suscité en moi une grande passion qui a abouti à la rédaction de l’ouvrage Hallyuwood (rires). 

Il y a eu différentes périodes tout à fait captivantes, commençant par « le premier âge d’or du cinéma coréen », au cours duquel 80 longs métrages ont été tournés entre 1926 et 1937 sur un total de 153 réalisés entre 1923 et 1945, dont la plupart des copies ont malheureusement disparu. Le second âge d’or, souvent erronément considéré comme le premier, se situe entre 1959 et 1969, avec un pic de 279 longs métrages réalisés en 1969, plaçant la Corée parmi les premiers producteurs mondiaux à cette époque. C’était une période frénétique, où certains réalisateurs tournaient jusqu’à dix films par an, et où les vedettes enchaînaient jusqu’à quatre tournages par jour, apprenant leurs textes depuis des prompteurs pendant les prises de vue, et étant la tête d’affiche de parfois cinq longs métrages différents sortant le même jour. Des mouvements cinématographiques fous ont émergé, comme les adaptations littéraires des années 1960, qui ont donné naissance à des chefs-d’œuvre tels que Le Village au Bord de la Mer (1965) et Le Brouillard (1967) (tous deux de Kim Soo-yong) ou La Moustache du Général (Lee Seong-gu, 1968). Les westerns kimchi (ou plutôt les films d’action mandchouriens) et les films d’arts martiaux des années 1970, ainsi que les films d’hôtesses de bar tournés entre 1974 et 1979, ont également marqué cette période.

Pourtant, lorsqu’on examine de près toutes ces périodes et ces succès, il est nécessaire de relativiser en termes de revenus : malgré le système des quotas de diffusion et les restrictions d’importation, les films américains ont toujours généré beaucoup plus de recettes que les productions nationales, jusqu’au fameux renouveau du cinéma coréen en 1997, et plus spécifiquement l’année 2001. C’est cette année-là que les parts de marché du cinéma local dépassent pour la toute première fois celles des importations étrangères, principalement américaines, avec un pourcentage de 50,1 %.

Selon vous, le succès récent du cinéma coréen aurait-il été possible sans la politique des screen quotas ?

Ah ! Très bonne question, à laquelle personne ne pourra jamais véritablement répondre sans avoir vécu dans un univers parallèle, dépourvu de ces célèbres quotas de diffusion, afin d’évaluer les vraies conséquences.

Pour les lecteurs, les quotas de diffusion, en gros, obligent les exploitants à diffuser des films coréens pendant un certain nombre de jours par an. Il est important de noter qu’ils diffèrent des quotas d’importation, qui, eux, exigeaient des producteurs coréens de réaliser trois films locaux pour obtenir le droit d’importer un film étranger avec une limite du nombre total des exportations selon les décennies.

Les quotas de diffusion ont été instaurés en 1967 sous la dictature militaire, représentant à cette époque une forme de censure déguisée et un protectionnisme excessif adopté par la Corée du Sud en plein décollage industriel. Le nombre de jours dédiés à ces quotas a varié au fil des décennies, avec un maximum de 146 jours par an, pour ensuite être réduit de moitié, sous la pression américaine, en 2006, et fixé à 73 jours. De manière curieuse, une première période de « récession » peut être observée entre 2007 et 2012, marquée par un désintérêt du public et une baisse des parts de marché, retombant à 42 %, soit son niveau le plus bas depuis 2001.

Personnellement, je suis convaincu qu’établir des screen quotas a indéniablement des conséquences sur le marché, ne serait-ce qu’en offrant une visibilité décuplée aux productions locales tout en réduisant la présence des productions étrangères ; mais je crois également que l’impact supposé de ces mesures est quelque peu trompeur. Il existe des rapports rédigés dans les années 1970 qui ont démontré que le nombre de jours dédiés aux quotas était en réalité très peu respecté par les salles, en raison de l’absence d’un contrôle rigoureux, et, dans le pire des cas, d’une amende à payer, qui valait bien moins que les bénéfices espérés en donnant plus de visibilité au cinéma étranger, notamment américain. Certains exploitants ont même admis « contourner » les quotas de diffusion obligatoires en programmant les films coréens aux créneaux horaires les moins favorables, donnant ainsi l’avantage aux blockbusters américains, jugés plus rentables.

Les quotas de diffusion n’ont, par exemple, en aucun cas stoppé le déclin du cinéma coréen dans les années 1970, 1980 et 1990 ; il existe trop de facteurs influant sur l’intérêt des spectateurs par ailleurs. Le renouveau et le succès mondial du cinéma coréen contemporain s’expliquent notamment par l’organisation d’une véritable industrie cinématographique et la présence de producteurs de qualité ayant donné leur chance à de jeunes talents pour révolutionner le cinéma coréen traditionnel dans les années 1990, la vague hallyu résultant d’une série de mesures politico-économiques soigneusement planifiées, de l’élan de fierté nationale et de la construction de multiplexes au début des années 2000… Les quotas de diffusion ne représentent qu’un élément parmi tant d’autres sur la vaste plage qui définit l’industrie cinématographique coréenne dans sa totalité.

Derrière les cinéastes de renommée mondiale primés dans les grands festivals, c’est toute une industrie qui s’est peu à peu structurée, avec la KAFA (Korean Academy of Film Arts), le festival de Busan ou encore le Cofic. Que pensez-vous de ce modèle et en quoi est-il encore perfectible ?

Oui, je suis d’avis que tout s’est déroulé de manière conjointe, particulièrement lors de la période de « démocratisation » et d’ouverture du pays au monde dans les années 1990. La vague hallyu a joué un rôle significatif, car toutes les institutions mentionnées ont émergé durant la mise en place d’une politique culturelle effective au cours de cette décennie. 

Bien que le COFIC (Conseil du film coréen) ait été fondé en plein régime militaire en 1973, il n’a réellement adopté son fonctionnement actuel (notamment calqué, en partie, sur le CNC français) qu’à partir de 1999. 

La KAFA existe depuis 1984, mais elle a gagné en prestige dans les transformations culturelles des années 1990 pour devenir au fil du temps l’une des meilleures écoles de cinéma au monde, avec de nombreux exemples de films de fin d’études ayant fait le tour des festivals internationaux en raison de leur qualité (et pour alimenter la polémique, je me permets de questionner le nombre de productions FEMIS récemment programmées à l’international à la même période, juste à titre de comparaison…). 

Le Festival de Busan a été créé en 1996 pour servir de vitrine du cinéma mondial en Corée, mais surtout pour propulser les productions locales à l’international. Dès l’année suivant sa création, il a permis la programmation des premiers films de Kim Ki-duk et de Hong Sang-soo dans des festivals internationaux après leur programmation à Busan.

Vous avez raison de parler de « structuration », car les années 1990 représentent véritablement une période charnière marquant la fin de l’ancien système traditionnel et désuet du cinéma coréen et de l’avènement de la structuration d’une véritable industrie cinématographique. En revenant aux quotas de diffusion et d’importation, même si leur abolition en 1986 a initialement causé d’importants préjudices en plongeant le cinéma coréen au plus bas depuis les années 1950, elle a également rapidement permis aux professionnels coréens d’apprendre du modèle américain pour restructurer leur propre industrie et y faire face. En fin de compte, un mal pour un bien, démontrant une fois de plus l’incroyable inventivité coréenne pour faire face aux « forces envahissantes » et réinventer leur propre industrie pour en tirer le meilleur parti.

Selon vous, par où devrait commencer le spectateur désireux de s’initier au cinéma sud-coréen ?

Eh bien, cela relève du goût personnel de chacun ! Heureusement, contrairement à ce qu’on voudrait parfois nous faire croire, nous possédons tous nos propres préférences, sensibilités et appréciations culturelles. Sans cela, le monde serait dominé par des productions Marvel interchangeables et des franchises à la Fast & Furious… Quelle horreur, rien que d’y penser…

Si j’étais à la place des lecteurs.rices, je tapoterais simplement « meilleurs films coréens » dans un moteur de recherche pour parcourir les divers résumés et avis et piocher au gré de ses envies. Beaucoup de titres se recoupent finalement, selon les genres recherchés.

Comme je suis sûr que cette réponse ne vous satisfait pas du tout, je débuterai, dans un cinéma plus « commercial » (même si cela ne veut pas dire grand-chose) par la sainte trilogie composée de Bong Joon-ho, Park Chan-wook et Kim Jee-woon et de leurs filmographies respectives. Cela vous permettra de vérifier pourquoi tout le monde parle d’eux et de découvrir des sacrés bons titres, dans divers genres et foncièrement différents. 

En ce qui concerne un cinéma plus « indépendant » (ce qui ne veut rien dire non plus), je recommande l’ensemble des films de Lee Chang-dong, ainsi que les premières œuvres de Kim Ki-duk (jusqu’à L’Arc, 2005), bien que je mette en garde du fait que ce dernier a été accusé de harcèlement moral, physique, sexuel, voire de viol, par plusieurs femmes. Chacun se fera son avis quant au fait de se plonger dans sa filmographie, ou non… Pour ce qui est de Hong Sang-soo, que je qualifie parfois de « réalisateur olive », l’opinion sur son travail est généralement tranchée : ou bien, on adore, ou bien on déteste, ou bien on tente de revisiter de temps à autre sa filmographie pour finir éventuellement par l’apprécier. C’est un cinéma particulier qui, à mon sens, gagne en puissance au fur et à mesure que le spectateur vieillit. Je conseille sincèrement de visionner ses films par ordre chronologique : malgré de nombreuses répétitions, à mes yeux, l’évolution de sa filmographie est réellement fascinante à suivre.

Voilà déjà des bonnes bases, en plus de certains titres-clés, comme The Chaser (Na Hong-jin, 2008) ou Le Dernier Train pour Busan (2016) de Yeon Sang-ho. Ce dernier est un réalisateur dont les premiers films d’animation (destinés aux adultes) sont puissants, bien que peut-être moins adaptés aux néophytes, et dont les dernières productions en prises de vues réelles m’ont plutôt déçu, même s’il est l’un des rares réalisateurs à expérimenter et à fouler des nouvelles cinématographies jamais tentées auparavant. 

Ces suggestions peuvent sembler classiques, mais elles ne sont pas anodines : la plupart de ces films ont su laisser une empreinte indélébile dans leur époque, résistant à l’épreuve du temps. Ils offrent une base solide pour des discussions avec votre entourage, et il existe une abondance d’analyses en ligne pour approfondir progressivement vos connaissances et faire de nouvelles découvertes.

Pour les cinéphiles expérimentés qui pensent avoir exploré toutes les offres cinématographiques récentes, je suggère vivement de consulter la chaîne YouTube Korean Classic Film gérée par Les Archives du Film Coréen. Cette plateforme propose légalement et gratuitement plus de 120 films, dont certains font partie d’un catalogue de 450 titres au total. Tous les films sont accompagnés de sous-titres anglais, parfois français, et la plupart sont disponibles en version remasterisée 4K. On y trouve de véritables chefs-d’œuvre du cinéma coréen antérieur aux années 2000, ainsi que de nombreuses curiosités. La variété est telle que les énumérer serait fastidieux.

De plus, j’ai créé une page Facebook, Hallyuwood – Le Cinéma Coréen, où je partage, chaque vendredi, une recommandation parmi les titres de la chaîne. Il ne s’agit pas nécessairement de mes films préférés de tous les temps, mais plutôt de véritables découvertes cinématographiques. Ces recommandations sont complétées par des critiques que je poste sur le site SensCritique.

Pourquoi devrait-on lire Hallyuwood ?

J’ai envisagé cet ouvrage comme un livre que l’on peut lire de manière linéaire, de A à Z, ou bien en effectuant des choix sélectifs parmi les différents chapitres thématiques, sans risquer de se sentir désorienté. En d’autres termes, le livre suit l’ordre chronologique de l’histoire du cinéma coréen, divisé de manière générale à peu près par décennie. Chaque section débute par un chapitre introductif à caractère historique, replaçant le cinéma dans le contexte de son époque.

Ensuite, j’approfondis les genres cinématographiques les plus caractéristiques de chaque décennie, explorant parfois des thèmes inattendus tels que le mélodrame dans les années 1920, le western dans les années 1970, ou le cinéma d’horreur dans les années 1990. Même si chaque thématique peut être abordée de manière autonome, j’ai pris soin de maintenir un équilibre entre les différentes sections afin de garantir une cohérence d’ensemble et de manière à éviter les répétitions tout en fournissant des informations complètes. Ainsi, Hallyuwood s’ouvre à tout lecteur curieux d’explorer davantage le monde du cinéma coréen tout en s’adaptant aux préférences individuelles et envies de chaque lecteur.

Quoi qu’il en soit, j’attends avec impatience les retours des lecteurs et lectrices, dans le but d’engager des débats et des échanges. Il est fort probable que j’apprenne encore des éléments que je n’ai pas encore découverts, voire auxquels je n’aurais pas pensé. De plus, je suis ouvert à toute correction concernant d’éventuelles erreurs ou coquilles. Hallyuwood aspire à être un instrument de transmission, mais également un espace propice à l’échange – car, à mes yeux, rien ne vaut les interactions humaines !

Propos recueillis par Jonathan Fanara


Bastian Meiresonne a publié l’ouvrage Hallyuwood aux éditions EPA.

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